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lundi 11 avril 2016

Chapitre 4 (Le Journal d'un auteur perdu)


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Cher journal... Je rentre au pays 

Juillet 2010, 
Suite à mon échec professionnel imminent, Natalia m’a accordé quelques jours de congés. Je n’ai pas hésité une minute… Lorsque Paris devient nauséabonde à mon goût, il n’y a qu’un seul endroit où je peux retrouver calme et sérénité : Le Pays Basque. Je me suis donc empressé de prendre des billets de train pour aller retrouver mes Grands-parents. 
Mais avant mon départ, notre groupe d'amis a un anniversaire à fêter ce soir : Celui de Sémy. Nous nous sommes tous réunit, Eva, Fred, Romain et moi, dans un restaurant de la capitale. Généralement, il y a toujours un rebondissement imprévu dans nos célébrations… C’est un petit peu une tradition. Et cette année, c’est Romain qui est venu amener cette pierre à l’édifice. Nous sommes déjà attablé à nous raconter nos derniers petits problèmes, quand nous voyons Romain sur le boulevard d’en face, main dans la main avec un garçon. 
« C’est qui ce type avec Romain » demande Eva avec un début d’enthousiasme. « Romain m’a demandé si il pouvait venir avec un ami… » répond Sémy un peu dubitatif. « Et bien visiblement, il est venu avec SON ami… Bien ! sortez tous vos sourires ! » Cette phrase pleine de sarcasme, elle vient de Fred. Fred ne mâche jamais ces mots. C’est une de ses qualités car après tout il serait dommage de s’étouffer en ravalant ce que l'on pense. De mon coté, je reste silencieux… J’observe ce garçon assez énigmatique. Il marche avec prestance, comme s’il était au bras de l’amour de sa vie. En revanche Romain a le regard fermé, l’amour est moins palpable, on dirait qu’il tient la main du fantôme de l’opéra qui l’entraîne dans les basfonds de Paris.   
Durant le repas, nous apprenons à connaître ce garçon. Il s’appelle Gaetan et sa plus grande passion… C’est de parler de lui. Romain ne me quitte pas du regard de tout le repas. Il semble me crier en silence « Aide moi !!! » Malheureusement je ne vois pas trop comment lui venir en aide dans l’immédiat… Devrais je planter mon couteau à steak dans la trachée de Gaetan pour qu’il la ferme ? ou peut être me contenter de l’assommer d’un coup sec avec la bouteille de Chardonnay ?
Une fois les plats saucés et les cadeaux échangés, nous regagnons tous nos chez nous. Dans mon petit 20 m2, je prépare  tranquillement ma valise. Quand mon téléphone se met à sonner. C’est Romain. Il s’est enfermé dans sa salle de bain pour m’appeler. En fond sonore, j’entends les mélodies dépressives de Barbara. « J’ai mis de la musique pour qu’il n’entende pas la conversation… Julien c’est horrible, je ne sais pas ce que je fous avec lui ! » Romain m’explique alors qu’il s’est un peu retrouvé malgré lui dans cette relation. Il pensait qu’il était clair sur ses sentiments seulement Gaetan, qui ne se soucis que de lui même, a profité de la gentillesse de Romain pour démarrer une relation a sens unique. 
S’il attend que je lui apporte des solutions, il est vraiment mal barré. Je suis le roi de l’esquive en matière de rupture. En quittant Charles je m’étais d’ailleurs installé chez Romain pour éviter de le croiser ! Je lui conseille d’être franc et direct avec Gaetan pour se libérer de cette histoire… Même si je sais très bien que je ne m’appliquerai pas ces conseils.      
Le lendemain matin, je suis à la gare Montparnasse de très bonne heure direction le sud ouest. Juste le temps de prendre un café et un journal qu’il est temps de monter dans le train. Je déteste le train. C’est long et monotone. Je prends toujours avec moi des millions de choses pour m’occuper pendant le trajet : un lecteur mp3, un livre, un cahier pour écrire, mon pc portable pour regarder un film… Mais dès que le train quitte le quai, aucune de ces activités ne me divertissent. Et c’est partie pour 5 heures de galère. 
Mais ce que je déteste le plus dans le train, c’est la vieille dame qui s’assoit à côté de vous. Celle qui commence à vous parler. Vous vous sentez obliger de l’écouter… et comme les hasards de la vie sont bien faits, elle descend à la même gare que vous… Pour sa pause déjeuner, elle n'a rien trouvé de mieux que de déguster des oeufs durs. L’odeur se répand dans tous le train et son haleine devient insupportable… 5 heures de galère !!
Heureusement, mon téléphone sonne, c’est Romain. Il me rappelle pour me confier un autre secret. La vieille dame qui est à coté de moi, déjà vexé que j’ai mis fin à sa conversation à sens unique, me montre l’autocollant « Il est interdit de téléphoner dans le wagons » avec ses doigts remplis d’oeuf.
Romain me raconte que depuis quelques jours, il craque pour un garçon qu’il a rencontré à une fête organisé par une amie d’enfance. Il s’appelle Alex, il est drôle, plutôt charmant et surtout très "old school" comme Romain. Cela fait plusieurs fois qu’ils prennent des cafés ensemble pour apprendre à se connaître.  « Et bien écoute n’hésites pas ! sors avec ce Alex et clarifie les choses avec Gaetan. Si je rencontrai un mec en or, je ne le laisserai pas passer. Tu as un coup de coeur alors fonce ! » 
En raccrochant, je m’excuse auprès de la vieille dame. Elle se lèche les doigts remplis d’oeuf tout en me dévisageant. Elle ne m'a plus m’adresser la parole jusqu’à notre arrivée... Je pense que mon homosexualité, lui est aussi écoeurante qu’une odeur d’oeufs durs dans un wagon étroit.   
Quel bonheur d’être au pays ! Le sud-ouest c’est un petit peu mon réservoir à oxygène, j’en profite pour me balader le long de la plage ou dans les grandes étendues du pays basque. J’oubli peu à peu Natalia, Manoli et mes questionnements incessants. Mon calepin sous le bras, je me remets à écrire, je retrouve l’inspiration. Mon roman fantastique reprend vie. Je le réinvente, le redessine et le laisse me chuchoter les mots à poser sur le papier.
Il est vrai qu’à chaque fois que je reviens ici, je retrouve mes forces et mes aspirations. C’est sans doute parce que je suis lié à cette terre… Parce que mes racines sont ici. Il y a une chose que j’adore faire chez mes grands-parents, le soir, alors que Papi dort sur le fauteuil : Ouvrir sa bibliothèque et feuilleter ses livres de Victor Hugo. Lire juste un poème ou un extrait de roman. 
C’est mon Papi qui m’a fait découvrir (et surtout apprécier) les mots d’Hugo. L’été 1997, mon grand père m’a vu disperser dans la maison mes jouets du Bossu de Notre Dame de Walt Disney… Cette adaptation ne lui plaisait guère. Un après midi, il a posé "Notre Dame de Paris" dans mes mains. Et devinez quoi ?… J’ai trouvé ça chiant ! Naturellement j’étais trop jeune… Peut être pas encore prêt pour découvrir les oeuvres de Victor Hugo. Mais en m’ouvrant pour la première fois sa bibliothèque, mon grand-père venait de changer mon destin… Et je savais grâce à lui que lorsque je serais prêt, elle serait toujours ouverte pour moi.
Comme l’inspiration ne me quitte pas ce soir, je demande à Mamie de me parler de ses parents et de son enfance dans le pays basque. Je note ses confidences sur mon cahier pour la postérité avec le secret espoir de pouvoir un jour leur offrir les mots et les émotions qu’elles méritent. 
Hélas, la vie parisienne me ramène trop vite sur le chemin du retour. Il est temps de prouver à Natalia que je mérite ce job. Pourtant, une part de moi n’a plus envie de s’y investir. J’ai retrouvé le goût d’écrire au pays de mes racines. Et cet état d’esprit mérite bien une chronique…  


Les racines (publié le 28 septembre 2010)

Je pense qu’à bien des égards, ce qui m’a permis d’avoir une aussi grande liberté de penser, de découvrir, de partager et d’apprendre… Ce sont mes racines. Il m’apparaît évident que nos racines sont le phare… La lueur, la promesse que notre route n’est pas vaine.

Les années passent et filent… Les générations se côtoient, se séparent… disparaissent puis s’oublient. Car personne ne laisse une trace sur cette terre, Juste un claquement de porte brutale et derrière soi, tant de souvenirs sans âmes… Définitivement incompris pour ceux qui sont restés.

J’ai beaucoup médité sur mes racines ces dernières années… Pourquoi suis-je ce que je suis. Pourquoi et par quel hasard je me retrouve ici, à ce moment donné… Et si les souches de ma vie en détenaient les réponses ?

Tradition faite depuis mon enfance, l’été est l’occasion de remonter un peu dans mes racines et d’oublier un instant Paris. Une visite chez Papi et Mamie dans leur maison près de Capbreton. Je me souviens encore de ce sentiment qui m’habitait quand j’étais gosse… Cinq heures de train de Paris jusqu’à Dax, un regard par la fenêtre, un défilé de paysages, de villages qui ne m’inspiraient qu’ennuie et lassitude.

Puis une fois passé Bordeaux, la douce apparition des forêts de Pins, annonçant l’arrivée au pays. Je me souviens de cette quiétude qui m’envahissait en découvrant ces colonnes végétales à perte de vue. C’était comme si, tout en lorgnant ce décor familier et rassurant, je pouvais déjà imaginer Mamie nous attendant à la gare, impatiente… L’odeur déjà accessible à mes narines du bon repas dormant dans le four savamment accompagné de pâtés, foie gras et pain de campagne. Le chant calme et espiègle des tourterelles sauvages et le bruit vif et indomptable des vagues.
En grandissant, ce sentiments que je croyais éphémère, ne s’est pas dissipé… preuve en est que mes racines s’entre-croisent dans les Landes. Cependant avec l’âge, j’ai cherché à comprendre… Cette sensation que je croyais si personnel, pourrait-elle me conduire bien plus loin sur le chemin des générations ? Ma mère… Mon père… Mes grands-parents n’ont-il pas eux aussi ressentis par le passé, cette force monter en eux, cette sensation d’appartenir à une terre et d’y être toujours attiré au-delà des âges ?
Connaître et partager ce sentiment tous ensemble nous permettrait surement de remonter encore le sentier de nos racines. Ma dernière visite au pays, a été l’occasion de partager avec ma Grand-mère, un sujet qui m’avait toujours intéressé mais que je n’osais que très peu aborder : la vie de mes arrières grands-parents. J’entendais si souvent ma Grand-Mère et ma Mère parler d’eux… J’étais friand de ces anecdotes étant petit… Il me semblait qu’elles m’appartiendraient toujours. Seulement la vie est ainsi faite… Un jour viendra où ma chère Grand-mère ne sera plus là pour me confier en rigolant ces bribes d’histoires endormies dans un temps lointain.

J’ai donc décidé cette année d’inscrire avec attention tout ce que Mamie pourrait m’apprendre de ses parents que j’ai toujours nommé Aitaxi et Amatxi (Traduction : Grand Père et Grand-mère en Basque). Ma Grand-mère n’est pas landaise, son enfance et ses racines sont au Pays Basque, à Saint Jean de Luz plus précisément ; Elle a grandi là-bas, dans une modeste ferme. J’adore le Pays Basque, il n’y a pas de terre plus généreuses et calme. C’est toujours une réelle source d’inspiration pour moi que de partir sur les routes d’Espelette, de Dancharia ou de Sare. Bien au-delà de l’appétit artistique, le Pays Basque c’est aussi le régal des babines… Une cuisine que je rêverai d’emporter partout avec moi !
Tout en griffonnant sur un cahier, attentif aux moindres détails que ma Grand-Mère partageait à propos d’Aitaxi et d’Amatxi, il me semblait être parti pour un long voyage sur un sentier familier mais pourtant jusque-là inconnu.

Ces vies étaient si immémoriales, voir romanesques, que ponctuellement, j’oubliais la véracité des faits, imaginant Mamie lire simplement un Roman d’Hugo ou de Zola, tel Les Misérables ou Germinal. Pourtant les confidences qui se jouaient cette nuit-là dans l’intimité du salon, ne parlaient pas d’un passé inaccessible, mais uniquement d’une page de nos vies tout juste tournée...

Celle d’un arrière Grand Père abandonné à l’assistance publique de Paris, d’un long voyage avec son frère qui le conduisit en famille d’accueil au Pays Basque. D’une arrière-grand-mère, fille ainée de paysans, placée dès son plus jeune âge en tant que demoiselle de maison chez un écrivain anglais, riche propriétaire de Saint Jean de Luz. D’un amour interdit et d’une Guerre mondiale. Comment expliquer que je retrouvais curieusement dans ces vies, une part de mes racines… Que j’y décelais le parfum de Paris et les délices de l’écriture.

Dévorant ces vies à la fois si humbles et tant miséreuses, j’imaginais, je ressentais l’odeur des sentiers qu’Aitaxi suivait à toute allure sur sa vieille bicyclette, les brises légères de bord de mer où Amatxi aimait méditer. J’entendais l’orchestre des fêtes basques sur la place de Saint Jean… J’avais simplement cette sensation qu’ils n’étaient finalement jamais partis loin de nous. Nous avions juste cessé de les voir… 
Plus tard dans les confidences de ma Grand-mère, nous évoquâmes la mère d’Amatxi qui n’était pas du pays. Elle avait grandi en Argentine et était arrivée en France au début du XXe siècle. Dernière étape sur le long courant de mes racines que j’ai pris soin de remonter avec attention et passion.

C’est donc là-bas que mon voyage se termine et que ma destinée a démarré. Ça serait le cœur remplis de force et d’histoire que je remonterai les rues de Buenos-Aires si un jour l’opportunité m’en est donné… Dans cette ville… d’où part ce Grand Voyage, cette valse qui redescend jusqu’aux boulevards bruyant de Paris. Cette valse que je poserai un jour sur le papier en pensant aux Pays et à ceux qui ont guidés mon chemin bien avant qu’il ne se dessine…

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