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vendredi 1 octobre 2010

Chronique 2010 : Les Temps durs…

Avant propos de la chronique : 
Grâce à Romain,  j’ai finalement retrouvé un travail assez rapidement. Je suis hôte d’accueiL au siège international d’une grande banque Rue Bergère à Paris. Mon travail est assez simple. Je prépare les plannings de réunion pour les collaborateurs. J’accueille ceux qui viennent de Londres, Berlin, Amsterdam ect… Je prépare les salles de visioconférence et m’occupe d’appeler des taxis, de réserver des billets de train ou d’eurostar pour ces gens si important.

Ma collègue Zahara est une fille adorable avec qui je m’entends très bien. Nous avons commencé à travailler ici presque le même jour. 
Tout comme moi, elle espère que ce travail sera temporaire et qu’elle pourra espérer mieux pour son futur. 

Comme l’avait dit Romain, l’avantage de ce boulot, c’est que dès la fin des réunions matinales, j’ai tout le temps pour écrire puisque le hall est vide et peu de monde nous sollicite. Cela me permet de me plonger pleinement dans l’univers de Faery, mon roman.
Il n’y a qu’une tâche qu’il ne faut pas oublier… Peut être la plus importante : Ouvrir le portique de sécurité à Madame Zeitoun ! 

Madame Zeitoun se trouve être la directrice des accueils de la banque. Lorsqu’elle passe, elle exige que les hôtes d’accueil la reconnaisse et lui ouvre instantanément le portique. 
Une légende raconte d’ailleurs que ceux qui nous ont précédés à ce poste, ont été virés pour ce simple manquement. 
Alors, j’écris toujours d’un oeil. Sur notre bureau nous avons une photo scotchée de Madame Zeitoun, avec écrit au marqueur rouge : OUVREZ LUI !!! 
Pour l’instant je n’ai pas encore eu l’occasion de la rencontrer … mais sait-on jamais… 

Après le travail, j’ai pris l’habitude de m’arrêter dans un couloir de la gare d’Auber où ce trouve Pépé, un SDF avec qui j’avais sympathisé durant mon été laborieux chez Manoli. Je partage mes tickets resto avec lui et nous échangeons quelques banalités avant que je regagne mon chez moi.   

Certains soirs, c’est chez Sémy qu’on se retrouve entre amis pour partager un repas. Nos maigres salaires d’artistes sur le fil ne nous permettent pas de faire des folies gastronomiques. On se contente de pizzas premiers-prix assez grasses et de sodas sans étiquettes. Je commence enfin à présenter les premiers chapitres de mon roman à mes camarades. Ils font enfin la connaissance avec mon royaume de fées, de lutins et de chevaliers dont je parle depuis tant d’années. Nos vies parisiennes sont parfois injustes… Les temps sont durs, la capitale est cher et les rêves tellement lointains. Une nouvelle chronique sur ce thème s’impose… 




Je ne pensais pas que l’automne reviendrait aussi vite sur la capitale… Que les feuilles se terniraient sans prévenir… Que le soleil se mettrait en intérim. Je ne pensais pas que la rentrée serait aussi difficile.

Je sais que ma famille ne comprendra jamais ce besoin d’être entre deux vies… Souvent sur la brèche… Mais j’en assume les conséquences. J’ai fait ce choix : vivre avant tout pour mes projets… Je me suis fait la promesse de ne jamais laisser l’écriture au bord d’un chemin. Je l’ai souvent fait pourtant… par lâcheté. 

Les temps sont durs… A bientôt 24 ans, je vis toujours dans un minuscule studio hors de prix. Je prie sainte Marie du capitalisme chaque soir pour que mon loyer n’augmente pas ! Même si l’art est ma force et l’écriture ma vie, je dois reconnaître que les fins de mois sont souvent difficiles et aléatoires.

Dans ma course matinale au milieu des parisiens stressés, Il m’arrive souvent de croiser Pépé à la gare d’Auber. Il est là, chaque jour, avec son vieille orgue qui a certainement vu plus d’hiver que tous les couloirs de métro. Diego, son chien, assis sagement à ses côtés…  Il l’écoute jouer et rejouer, pour un ticket resto devant les grands magasins où se pressent les touristes et les parisiennes emmitouflées dans leurs fourrures.

L’été passé, je travaillais chez Manoli au Printemps Haussmann et je croisais souvent Pépé et Diego. Je leur laissais furtivement un ticket resto, déjà bousculé par trois ou quatre hommes d’affaires pressés… 

Je me doute que ce n’est certainement pas grand-chose, mais je savais qu’ainsi, mes deux amis rejoueraient à mon retour, le lendemain sur les grands boulevards.

A ses yeux, j’étais un parmi tant d’autres. Il devait certainement me prendre pour un garçon parisien de bonne famille. Mes cheveux impeccablement coiffés, et mes vêtements Manoli de la tête aux pieds. Il me remerciait poliment tout en continuant sa balade. Il rejouait de vieux airs de chansons françaises, tout aussi clichés que populaires. Puis en quittant Manoli et les grands magasins, j’ai perdu Pépé et Diego de vue…

Alors que je risquais de me retrouver sans emploi, je m’interrogeais sur la fragilité du monde. Sur l’incertitude qui habille nos aspirations et des projets. 

Qu’est ce qui a causé la chute de Pépé ? Quel instant de sa vie a été fatal à son toit et sa sécurité ? L’art nous mène t-il inévitablement sur le chemin d’un orgue de Barbarie chantant notre précarité ?

J’aurais vraiment aimé réussir à l’école pour ma famille. Faire de longues études, devenir médecin ou avocat, dentiste ou banquier… Je les déçois chaque jour, je pense… 

Je vis d’instincts et de passerelles fragiles, vacillant au dessus d’une vie quasi-ratée.
Mais par chance je me relève toujours… Du moins pour l’instant. Depuis peu, j’ai retrouvé un travail…  J’ai retrouvé Pépé sur les grands boulevards. Pour la première fois, il ne m’a pas regardé comme quelqu’un parmi tant d’autres… Peut-être a t-il compris que ma vie est aussi aléatoire que la sienne… 

Que je survis dans ce monde sans vraiment y être intégré…Que nous sommes des frères d’orgues esseulés qui s’entre-aide à coup de tickets-resto… 
En réalité, la vie dans cette grande ville est si injuste… Lorsque l’on oublie un instant les grands monuments, les magasins et les costumes-cravates, on se rend compte que nous sommes tous en train de jouer de l’orgue avec Pépé et Diego… Pendant que l’élite se rit de la misère montante…

3 commentaires:

  1. encor un texte sublime tu et ultra douer j'aime venir lire t chronique c'est franchement l'un des plus beau blog sur lesuquelles je suis tomber et son auteur et une personne qui me passionne
    bisous
    Asco

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  2. Un de tes meilleurs écri c'est clair ! Merci de nous faire partager ton univers.

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  3. C'est vraiment beau ta vision des choses. Vraiment.
    Des fois il suffit de s'arrêter, de s'asseoir et de contempler ce qui nous entoure.
    Des gens qui courent, des personnes stressées, des gamins qui jouent ensemble dans leur bulle, des mamans comparant leur vie entre elles ou des papas désabusés en se demandant comment ils en sont arrivés là...
    Tout ce flux qui dicte où nous devons aller, ce que nous devons faire, quoi dire.
    Pour être intégré au système il faut suivre ce flux. Mais dès lors qu'on s'arrête un instant pour prendre le temps de regarder, on sort de ce flux et c'est là qu'on se rend compte qu'il y a un monde à deux vitesses.
    Peut-être que Pépé, toi, moi ainsi que d'autres personnes sont en dehors de ce flux volontairement ou non. Je pense que ça fait du bien des fois de se dire "wouw stop ! ça va trop vite là attends j'ai à peine cligné des yeux et voilà que les 30 ans sont là et j'ai l'impression de n'avoir rien vu !". Tu ne crois pas ?

    Peut-être que sortir des sentiers battus c'est justement ça qui nous construit. Pourquoi vouloir faire comme tout le monde ?
    C'est justement parce qu'il a fait comme tout le monde que Pépé s'est sûrement fait submergé par le système, et a quitté le train en marche...

    Alors tout est une question de point de vue tu sais. Vivre selon les codes apporte une certaine sécurité dans ce monde hostile... ou bien l'option du hors piste paraît tentante pour les allergiques au système, même si cela comporte beaucoup d'inconnues quant à la suite des évènements.
    Mais... n'est-ce pas ça qui nous rend vivants ?

    Concernant Pépé et les autres, je me suis toujours demandé comment ils en étaient arrivés là et surtout pourquoi ils en sont encore là. Leur histoire mérite-t'elle de s'arrêter ainsi ? Une part de nous même meure-t'il quand on est éjecté du système ?
    Il y a certes un monde à deux vitesses, mais je me demande parfois s'il n'y a pas tout simplement deux mondes bien distincts... et c'est bien triste.

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