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vendredi 12 octobre 2018

Cernunnos et la trahison des premiers hommes (Les Contes et Légendes de Faery, sous le vent d'Automne)



Durant les journées agréables de l'automne, de bon matin, Ivan et Mirage aimaient quitter la chaumière et rejoindre leurs amis Ben et Grimm. 
Ces deux lutins malicieux, vivaient dans les cimes d'un grand arbre qui marquait l'entrée du village d'Hevernesen. Plusieurs autres lutins avaient élu domicile dans cet arbre à la forme atypique. En ces mois d'automne, les feuilles commençaient à tomber et l'on pouvait apercevoir toutes les petites cabanes de lutins qui se suivaient le long des branches. 

Ivan, Mirage, Ben et Grimm passaient des journées entières assis sur les racines de cet arbre, regardant le ruisseau qui coulait à leurs pieds. Ils se racontaient des histoires que leurs avaient conté leurs parents ou des voyageurs sur les routes d'Eriù. 
Ce matin là, au loin, dans le forêt encore embrumé, ils aperçurent de larges bois semblable à ceux d'un cerf. Cette silhouette était à la fois majestueuse et inquiétante. 
Grimm en profita pour faire peur à ses camarades : 

"ce n'est pas un Cerf, c'est Cernunnos, le Roi des forêts" dit-il en s'amusant. 

"Il parait que Cernunnos déteste les Hommes ! ils l'ont trahis, il y a de cela très longtemps... Même s'il est mort depuis des siècles, certains disent qu'il revient sur nos terres à l'approche de Samain et qu'il n'hésite pas à se venger de la méchanceté passée des Hommes" argumenta Ben qui se goinfrait de châtaignes. 

Mirage n'avait pas à craindre les colères de Cernunnos puisqu'elle était une fée. Ben et Grimm non plus d'ailleurs, puisqu'ils étaient des lutins... Mais Ivan était un petit Homme. Il regardait assez inquiet la silhouette dans le bois en espérant qu'elle n'appartenait pas à cette créature d'autrefois.

"D'ailleurs l'an dernier Monsieur Prescott a disparu. Il est parti à la foire de Scarborough et n'est pas revenu à l'automne... Les adultes du village n'ont pas voulu nous inquiéter mais nous savons tous qu'il a croisé la route de Cernunnos" annonça Grimm pour faire un peu plus  peur à Ivan. 

Le petit garçon n'était pas top rassuré par cette histoire... Il demanda aux deux lutins de lui raconter pourquoi Cernunnos haïssait autant les Hommes. Ben qui adorait pendre la parole, s'empressa de commencer le récit de cette nouvelle légende.  


Cette histoire s’est déroulée en des temps immémoriaux. Peu de gens à Faery s’en souviennent… Puisque les Hommes ont tout fait pour que ce récit s’évapore à travers les âges…Le Royaume de Faery était bien différent… Jusque-là les clans du pays vivaient en harmonie avec la nature. Elle était leur seule guide et leur seule Reine. Parmi ces clans, on pouvait retrouver les Arkens, au sud de Faery, dans la région de Dinchenshas.

Les Arkens étaient des créatures anthrepomorphes (mi-humaine, mi-animal). Ils savaient se fondre au milieu des animaux de la forêt. Certains avaient des ressemblances avec les boucs, les chevaux sauvages, les loup, les renards ou encore les lynx. Leur chef était l’imposant. Lui seul possédait le plus important des panaches. le sage, Cernunnos avait tous les attributs des hommes, à l’exception de son visage qui lui donnait l’allure d’un cerf. Sur sa tête, trônaient deux magnifiques bois que tous les cervidés de Faery lui enviaient.
Cernunnos prenait grand soin de sa terre. Il en était tombé amoureux… Il savait la comprendre, l’écouter et lui demander conseil lorsque cela s’imposait. La majesté de Cernunnos et son respect pour la nature qu'i l'entourait, faisait qu'il était aimé de son clan. Les habitants de Faery le considéraient comme le dieu des forêts. 

Au temps du règne de Cernunnos, Dinchenshas n’était pas une région aride et abandonnée comme aujourd'hui. Les collines étaient belles, les court d’eaux nombreux et tumultueux. L'herbe, les plantes, les fleurs étaient abondantes. La forêt, tellement vaste et sauvage, que l'on pouvait s'y perdre. Les Arkens chérissaient leurs terres. Ils y organisaient souvent des fêtes, des danses durant lesquelles ils invitaient les autres clans à célébrer la nature. Cernunnos aimait, dans ses moments là, jouer de la flûte et laisser ses mélodies envelopper la forêt. Il n'y avait pas de doute : Les Arkens possédaient la plus belle des terres du Royaume.

Un jour, tandis que les fées commençaient à déposer l’automne à travers le Royaume, une nouvelle se répandit à travers bois. Les sirènes furent les premières témoins de cet évènement. Elles en parlèrent aux lutins, qui en parlèrent aux lépreuchauns, qui se confièrent aux licornes, qui eux-mêmes en avertirent les fées : Des Hommes étaient entrés sur les terres de Faery. 
Les clans se réunirent dans la région de Faé pour parler de cet événement peu anodin. 

Les seuls qui n'étaient pas encore au courant de la présence des Hommes étaient Cernunnos et les Arkens. 
Le gardien des Fées préférait qu'ils ne soient pas mis au courant tout de suite. Il savait que cela déclencherait une colère incontrôlable de Cernunnos. 

Le gardien des fées était lui-même un Homme. Il s’était égaré à Faery alors qu’il n’était qu’un enfant. Il se souvint que ce monde l'avait effrayé à son arrivée. Un monde inconnu, vierge de toutes civilisations. Un monde fait uniquement de forêts, de plaines, de vallées et de cascades. Un monde si différent de l'univers des Hommes. Le gardien avait eu la chance d'être recueilli par Cernunnos et les fées.  Il lui avait permis de trouver sa place et son rang dans ce royaume. Pourtant, malgré la confiance que Cernunnos portait au gardien des fées, il détestait les Hommes et s’était juré que plus jamais il n’accepterait que d’autres s’installent à Faery.

Le gardien des fées envoya plusieurs de ses demoiselles observer les Hommes qui venaient d'arriver. Lorsqu'elles revinrent à Faé, elles racontèrent, à tous les clans, qu'ils étaient nombreux, terrifiés et perdus. Ces Hommes semblaient ne pas vouloir repartir... Cela commença à inquiéter les Faeriens. Mais les fées tentèrent de rassurer les habitants du Royaume. Elles avaient pu communiquer avec eux. Ils étaient gentils et prêt à faire connaissance avec les autres clans. 

Mais maintenant qu'ils s'installaient sur les terres, il fallait prévenir Cernunnos. Tous les clans décidèrent de ce rendre ensemble à Dinchenshas pour annoncer la nouvelle à ce Roi des forêts. Les Sirènes remontèrent les rivières, les licornes galopèrent dans les vallées, les lépreuchauns empruntèrent les galléries souterraines tandis que le gardien et ses fées arrivèrent pas la forêt dense. 

Ils trouvèrent Cernunnos, assis comme à son habitude, sur une immense roche, jouant de la flûte pour envelopper les arbres d'amour et de douceur.  Personne n'arrivait à prendre la parole. Le gardien des fées s'approcha, pris une grande inspiration et dit : 

"Nous avons quelque chose à t'annoncer, Grand mage des forêts..." 

Cernunnos n'aimait guère le ton que prenait son jeune élève. Il rangea sa flûte et laissa le gardien lui raconter ce que les clans avaient vu. Cernunnos rentra dans une colère noire. Il demanda au fées de le conduire sans plus à attendre à la rencontre de ces Hommes. 

Le seigneur des forêts amena avec lui plusieurs de ces disciples Arkens. Après plusieurs jours de marche, il arrivèrent, en pleine nuit, sur le campement des Hommes. Ils avaient trouvé refuge dans les bois généreux d’Eriù. Les Hommes avaient monté un campement de fortunes avec quelques drapés et des abris chancelant avec du bois qu'ils avaient coupé.  

Alors que le brouillard s’était emparé de la forêt, Cernunnos fit une entré majestueuse et fantomatique devant les Hommes. Ils étaient une vingtaine. Des femmes, des enfants et des hommes. Lorsque Cernunnos arriva, il terrifia les gens du campement. Les femmes se mirent à hurler et les enfants à pleurer. L’homme-cervidé qui dans le fond avait un grand cœur, était toujours peiné de voir qu’il suscitaient la peur chez tant de monde. Mais ce soir là, il espérait que cette crainte lui permettrait de chasser les Hommes de Faery.

« Que faites-vous sur nos terres ? » demanda t-il.

L’un des hommes s’approcha de Cernunnos et tenta de lui répondre tout en bégayant.

« N…nous… nous nous sommes enfuis de notre vallée… Nous ne venons pas de votre monde… Nous venons de l’autre côté du brouillard… Les druides nous ont montré le chemin… »

Cette réponse ne convenait pas à Cernunnos qui haussa le ton pour effrayer un peu plus les Hommes.

« Je sais très bien d’où vous venez… Vous… Les Hommes… Je vous demande ce que vous faites sur nos terres !!!! »

« N… nous… nous avons dû fuir notre vallée…. Des Hommes…. Des Hommes sont arrivés par la mer et ont commencé à tuer nos druides, à piller nos richesses, à salir nos dieux et nos offrandes… »


L’Homme qui racontait cette fuite, tremblait de la tête au pied. L’horreur, qu’il venait de vivre, pouvait se lire dans ses yeux et sur ses lèvres hésitantes.
« Les chefs de nos villages sont morts… Nos Druides aussi… Ils nous ont juste dit de courir à travers le brouillard de nos forêts pour revoir l’autre monde… Votre monde… Faery »  

Cernunnos comprit que ses Hommes n'étaient pas venus jusqu'à Faery de gaité de coeur. Plus rien ne les attendait de l'autre côté du brouillard. Leur monde n'existait plus... 

"Nous permettez-vous de rester ici dans votre Royaume ?" demanda l'Homme qui jusqu'à présent apparaissait comme le plus téméraire. 

Cernunnos refusa de répondre à cette question et l'emmena avec lui dans les bois. Il apprit à le connaître et à le cerner. Il répondait au nom de Dagda. C'était un paysan, peu habile mais qui possédait une grandeur d'âme. Il savait s'exprimer et avait le goût d'apprendre. 
Cernunnos décida de lui accorder sa confiance et se proposa d'être son professeur afin de l'aider à s'installer à Faery avec les siens. 

Le mage des forêts appris à Dagda tout ce qu'il devait savoir sur la nature, les bois, les rivières, les cascades, les océans, les vallées, les saisons. Il lui enseigna la médecine des plantes et le langage des animaux. Les fées et le gardien aussi enseignèrent à Dagda. Ils lui apprirent les secrets de la magie qui vivait partout dans ce Royaume. 

Tous les clans aidèrent les premiers Hommes à bâtir leur village. Un village adorable fait de maisonnettes en toits de chaume. Des chemins en terre battue et des potagers qui changeaient de couleurs et de saveurs au gré des saison. Pour remercier Cernunnos, Dagda lui offrit son épée. Une épée lourde et imposante... Le dernier souvenir qu'il avait de son père. 
Cernunnos, touché, décida de lui offrir en retour, sa flûte qui lui était si chère. Il annonça à Dagda que cet instrument avait plus d'une vertu. Elle apaisait les forêts, envoutait les animaux et divertissait les autres clans du Royaume. 

Cernunnos avait bien changé... Lui qui était autrefois si hostile à l'installation des Hommes à Faery, paressait plus ouvert. Ils s'était fait de précieux amis parmi les Hommes et cela n'avait pas de prix. Fier du cadeau que lui avait offert Dagda, Cernunnos planta l'épée, tel un arbre, en plein coeur de Dinchenshas. Il lui offrit un parterre de pierres et des fleurs sauvages. 
Mais un matin d'automne, Cernunnos découvrit avec stupeur que son abondante région commençait à mourrir peu à peu. Les arbres cassaient, les rivières s'amenuisaient, l'herbe et les fleurs sauvages disparaissaient. Il commença à croire que cela venait de l'épée qu'il avait plantée dans le sol. Lorsqu'il tenta de l'en extirper... Elle ne bougea point mais d'immense fissure apparurent et se propagèrent dans le sol et à travers les forêts malades.  

Cernunnos partit sans plus attendre au village des Hommes pour en parler à Dagda. Le mage des forêts espérait récupérer sa flûte pour sauver ses bois et ses vallées. Lorsqu'il arriva à leur village, il découvrit avec effroi que Dagda ne faisait pas bon usage de sa flûte. Il s'en servait pour attirer les animaux et les chasser, pour amadouer les arbres et les couper et pour divertir les autres clans qui décidèrent d'en faire le Roi de Faery. Dagda voulait un palais colossal. Il décida de mettre le feu au village que Cernunnos leur avait construit et commença à ériger un château et une ville emprunt d'arrogance sur l'immense lac de Scarborough. 

Dagda refusa de s'entretenir avec Cernunnos et ne voulut pas lui rendre sa flûte qui était bien trop précieuse. Le mage des forêts s'en voulut d'avoir fait confiance aux Hommes... Ces créatures égoïstes, qui désormais, dénaturées le Royaume à leur guise pour y construire des palais, des routes, des bateaux immenses... Les Hommes n'hésitaient pas à détourner les court d'eau, à tuer les forêts et à renier le langage des animaux... Cernunnos passa le restant de ses jours à maudire les Hommes. La grandeur de Dinchenshas ne fut plus qu'un lointain souvenir... Les arbres disparurent, la terre devint aride et l'eau cessa d'y faire son lit. 

Aujourd'hui Cernunnos n'est plus... Néanmoins son âme continue d'arpenter les forêts et de punir les Hommes qui ne respecte pas sa grandeur. Il ne reste plus rien de l'héritage de Cernunnos... Sa flûte ne fut jamais retrouvé... Mais dans la pauvre région de Dinchenshas ont peut encore voir l'épée maudite de Dagda qui dort au milieu des pierres.

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