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mardi 24 avril 2018

Chapitre 4 (Il neigera bientôt sur Pine Ridge)

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(Version Audio du Chapitre 4) 

Chapitre 4

Les jours qui suivirent devinrent inquiétant pour la tranquillité de Flanagan. Une véritable escalade de violence commençait à se mettre en place entre l’armée et les Indiens. 
Les différents régiments avaient tenté d’empêcher le rassemblement entre les tribus Lakotas et Cheyennes, menaient respectivement par Crazy Horse et Sitting Bull. 

Les Indiens multipliaient les attaques. N’hésitant plus à s’en prendre aux chercheurs d’or dans les Black Hills ou à attaquer des domaines et des fermes alentours. Depuis Flanagan, nous entendions l’écho des coups de feu et les cris des guerriers dans les plaines. Ma mère continuait malgré tout ses tâches quotidiennes à la ferme. Elle gardait la tête froide et tentait de faire bonne figure pour me rassurer. Mais je savais qu’elle s’inquiétait de plus en plus pour la sécurité de mon père. Nous étions sans nouvelles de lui et ses camarades. Ma mère semblait toujours crispée et nerveuse lorsqu’elle voyait passer des convois de l’armée avec des cadavres ramenaient des Black Hills. Elle craignait l’instant où l’on viendrait lui ramener le corps de son amour, Elliott O’Sullivan. La situation qui s’installait dans la région menaçait grandement notre sécurité. Un soir, tandis que nous soupions dans le calme en tentant d’occulter les coups de feu résonnant dans le lointain, ma mère me demanda : 

« Que dirais-tu, si nous quittions Flanagan quelques temps et que nous partions vivre chez Tante Kathleen ? » 
Je ne voulais pas quitter la ferme. Mais je voyais bien qu’à travers cette question ma mère tentait de prendre les décisions nécessaires pour assurer notre bien-être.

Nous ignorions encore que par delà les Black Hills, en ce jour du 26 Juin 1876, c’était déroulé l’une des plus importante bataille de l’histoire des Etats-Unis : La Bataille de Little Bighorn. 
Little Bighorn se trouvait bien loin de chez nous, dans le territoire voisin du Montana. Sitting Bull, Crazy Horse, le chef Gall et Lame White Men avaient réunie toutes leurs tribus et leurs meilleurs guerriers… Chankoowashtay comptait parmi eux. Durant deux jours, le 7e régiment de la cavalerie, avec à sa tête Georges Armstrong Custer, se lança dans une bataille sanglante sur les plaines de la rivière Little Bighorn avec les Indiens. 

Mais cette fois, l’Histoire semblait prendre une tournure inattendue. Même si Sitting Bull ne prit pas part à la bataille, il fut heureux d’apprendre que Crazy Horse et les braves réussirent le tour de force incroyable de remporter la victoire. Le bilan de ce combat fut amer pour les Etats-Unis. 267 soldats furent tués. Mais surtout, Custer mourut sur le champ de bataille. Celui qui fut, pour beaucoup, le héros des guerres indiennes et l’ennemi numéro un des Cheyennes et des Sioux. 

Malgré leur victoire, les différents guerriers se séparèrent pour contre carré d’éventuelles représailles. Mais Sitting Bull et Crazy Horse, gargarisés par leur victoire ne comptaient pas en rester là. Ils espéraient continuer le combat pour faire reculer une bonne fois pour toutes les ‘’blancs’’ des Black Hills. Les groupuscules de guerriers ne tardèrent pas être recherchés ardemment par l’armée. Quelques Sioux et Cheyennes encore habiles et déterminés n’hésitaient pas à poursuivre les attaques ici ou là à travers la région.

Le lendemain de la bataille de Little Bighorn, tous les journaux du pays relataient les faits. Cette défaite fut amer. Les dirigeants à Washington savaient que cet événement était un coup dur porté à l’honneur de l’armée des Etats-Unis. L’opinion publique espérait qu’une décision forte serait prise contre les rebelles Sioux et Cheyennes. Mais à Flanagan, malgré les agitations de ces derniers jours, nous n’avions pas encore eu vent de cette histoire. Les journaux arrivaient chez nous avec plusieurs jours de retard.   

Notre vie continuait calmement son court. Je me souviens parfaitement de ce jour là… Celui où les soldats sont venus à Flanagan pour nous demander de quitter la ferme, ma mère et moi. Le temps était orageux et le ciel gris, plus bas que d’habitude. Une brume humide recouvraient les collines qui dominaient les plaines. 

«Madame, je suis le Sergent Thomas, je viens vous prévenir que des rebelles Indiens en fuite se baladent dans les alentours. Ils ont brûlés et attaqués plusieurs fermes. Pour votre sécurité nous vous conseillons de quitter votre exploitation quelques temps. Il serait bon pour vous de rejoindre la ville. Tout cela ne sera que l’affaire de quelques jours, le temps que les Indiens ne soient arrêtés et envoyés à Pine Ridge » 

Les mots du Sergent Thomas, inquiétèrent grandement ma mère. Cela faisait plusieurs jours qu’elle contenait ses angoisses face aux représailles indiennes et au fait que nous étions sans nouvelles de mon père. Elle en profita pour demander au Sergent s’il avait eu vent de la présence et surtout du bon déroulement de l’expédition de son époux. 

« Je n’ai malheureusement aucune informations à vous donner sur votre mari chère madame. La seule chose dont je peux vous parler, c'est de la grande bataille à Little Bighorn et ce n’était pas beau à voir » 
Le Sergent Thomas, tout en se triturant la moustache, nous raconta en détail l’affrontement qui avait eu lieu dans les plaines. Il n’épargna aucun détails.
« Le spectacle que j’ai vu là bas était horrible Madame. Des cadavres de mes camarades par centaines. Le général Custer étendus sans vie dans une herbe abreuvé de sang. Il avait reçu plusieurs coups de fouet, des coups de couteaux et des balles perdues. Nous n’avons retrouvé qu’un seul survivant… Un cheval qui s’appelle Comanche »
           


Beaucoup de détails de cette histoire m’échappèrent car ma mère recouvrait mes oreilles avec ses mains douces. Elle tentait de me préserver des atrocités que le Sergent Thomas déblatéraient. Il était visiblement encore sous le choc, nullement prêt à épargner quelques faits, et ce malgré la présence d’un enfant. Je voyais bien l’inquiétude et la terreur gagner peu à peu les yeux de ma mère. A peine le Sergent Thomas parti, elle me demanda de regagner la maison pour rassembler mes affaires. 

« Dany, je vais m’occuper de ranger et nourrir les bêtes… De ton coté je vais te demander de préparer quelques affaires que tu souhaiterais emporter à Sioux Falls. Je viendrais te rejoindre dès que j’aurai fini… »

Sur ces mots, ma mère rentra les poules, les porcs, les vaches. Elle en profita pour ramasser encore quelques légumes malgré l’arrivée d’un vent désagréable qui annonçait le tonnerre et la pluie. Dans la maison, je sortis de dessous mon lit, un large sac de voyage en cuir. Il était usé et rempli de poussière. Il appartenait à mon père qui l’avait eu au moment de s’engager dans l’armée à ses dix neuf ans. J’y entassais le plus d’affaires possible sans trop réfléchir. Au moment de fermer le sac, je n’oubliai pas d’y glisser le loup en bois de Chankoowashtay. Même si la guerre semblait bel et bien déclarée entre nous, j’espérais que ce loup continuerait à symboliser mon admiration pour les Sioux. Je voulais croire qu’une issue positive était encore possible. J’étais bien loin de mesurer la graviter des événements qui venaient d’avoir lieu.  

Lorsque la nuit fut complètement tombé sur Flanagan, ma mère regagna la maison à son tour. Elle était agitée. Je la voyais se hater et passer de pièce en pièce, pour rassembler elle aussi ses affaires les plus précieuses. Très vite, nous entendîmes des coups de feu qui se mélangeait à l’orage qui grondaient près des rocheuses. Mais cette fois, les détonations des fusils semblaient proches… Très proches. Ma mère me demanda de me mettre sous la table. Elle prit soin d’éteindre le plus silencieusement possible, toutes les bougies et les lampes à pétroles qui éclairaient la maison. Elle attrapa la carabine de mon père qui restait toujours accrochée au dessus de notre cheminée, et vint me rejoindre sous la table.  

Dans le noir le plus complet, j’étais apeuré. De temps à autre, des éclairs venaient illuminer furtivement la pièce d’une lumière peu apaisante. J’agrippais la longue robe de ma mère de mes mains frêles. On entendit des voix graves et masculines qui rodaient autour de la maison. Ces voix aussi semblaient agitées et nourries par la panique.  Je fermais les yeux pour tenter de refouler mes peurs. Je percevais, sans trop de difficulté, trois voix bien distincts. Elles parlaient dans un dialecte qui m’était inconnu. Peu à peu les voix s’éloignèrent. A l’écoute, elles paraissaient se diriger en direction de l’étable. Assez vite, nous commençâmes à entendre les animaux s’agiter. Ma mère sortit de dessous la table et me chuchota tout en me caressant les joues de ses mains tremblantes :

« Dany, écoute moi ! Je vais voir ce qu’il se passe à l’étable… Si je ne reviens pas ou si tu entends un coup de feu, sort par la porte de derrière et court jusqu’au fort militaire. Le sergent Thomas t’aidera à te rendre à Sioux Falls »

Ma mère embrassa mon front, se dirigea calmement jusqu’à la porte d’entrée et marcha lentement vers l’étable tout en serrant la carabine de toutes ses forces. J’étais terrorisé. Je pris le temps de sortir le totem de Chankoowashtay du sac en cuir que j’avais posé sur la table. Je le portai contre mon coeur pour lui demander de protéger ma mère. 

J’attendis plusieurs minutes, comme elle me l’avait demandé. Je restais immobile devant la fenêtre à scruter son retour. Ne la voyant pas revenir, je commençai à pleurer et à laisser la panique m’envahir. Je devais suivre ses directives et rejoindre le fort militaire. Mais je ne pouvais me résoudre à m’enfuir comme un lâche. Mon père me disait souvent que chez les Sioux, les braves ne prenaient jamais la fuite. Ils affrontaient leur peur et gardaient la tête haute, quoi qu’il en coûte. 

Je décidai donc de m’appliquer ce précepte. Contre les conseils de ma mère, je fis volte-face et me rendis à mon tour en direction de l’étable tout en gardant précieusement mon loup en bois, serré tout près de mon coeur. Il y avait de l’agitation dans l’étable. Plus je me rapprochais, plus je percevais l’agressivité dans les voix masculines qui avaient pris possession des lieux. Lorsque j’entendis ma mère hurler, j'achevai le peu de distance qu’il me restait à la course et poussai la porte de l’étable sans discrétion et avec toute mes forces.   

« Non Dany ! Sauve toi !!! » hurla ma mère avec désespoir. 

Lorsque je tournai la tête dans sa direction, je la découvris les mains ligotées et le visage rempli de larmes et de sueur. Deux guerriers indiens la tenaient fermement et sans ménagement. Le premier avait la face complètement recouverte d’une peinture noire luisante qui faisait ressortir la colère de ses yeux. Il agrippait violemment les cheveux roux et ondulées de ma mère. Le deuxième portait des peintures de guerre un peu partout sur son corps. De son nez jusqu’au front, il avait dessiné de larges bandes rouges et blanches à l’horizontale. Sur son torse, on pouvait suivre des sillons pourpres qui ressemblaient fortement à des griffures et se confondaient avec ses réelles blessures de guerre. Il tenait, dans sa main gauche, un poignard qu’il avait sans doute récupéré sur le cadavre d’un soldat de l’armée. Il le maintenait sans vergogne sur le cou de ma mère effrayée. Je ne voyais aucune compassion dans son regard et il n’avait que faire des pleurs de la femme qu’il retenait en otage.   

Un troisième Indiens était dans la grange. Il se passa plusieurs minutes avant que je le distingue. Il était allongé dans le foin près des meules qui nous servaient à nourrir les bêtes. Il semblait plus mal en point que ses camarades et était visiblement blessé. Lui aussi portait plusieurs peintures de guerre. Mais les siennes avaient coulé et s’étaient presque effacées à cause de la pluie qui tombait dehors. Je reconnu sans mal Chankoowashtay, le Lakota qui m’avait fasciné à Sioux Falls. 

Le guerrier, blessé, me dévisagea longuement. Il reconnu surtout le totem qu’il m’avait offert et que je serrais toujours dans ma main pour canaliser ma peur. Chankoowashtay visiblement affaibli, s’adressa aux deux hommes qui retenaient ma mère. Il leur parla dans sa langue. Je ne comprenais rien mais je savais déjà que le guerrier prenait notre défense. Après une discussion visiblement houleuse et dont l’issue était plus incertaine que je le pensais, les deux Indiens lâchèrent ma mère qui s’effondra sur le sol. Je me précipitai à son chevet. Elle reprenait lentement son souffle, tout en regardant Chankoowashtay, allongé dans le foin. Elle commençait à comprendre qu’elle lui devait la vie. 

« C’est Chankoowashtay ! l’Indien que j’ai rencontré à Sioux Falls et qui m’a donné le totem » répliquai-je à ma mère comme pour appuyer l’importance que ce guerrier avait à mes yeux. 
« L’armée nous pourchasse. Ils ne vont pas tarder à arriver » lança Chankoowashtay tout en appuyant ses mains sur sa blessures. 

Il avait visiblement reçu une balle dans l’abdomen. Il saignait abondamment et n’arrivait pas à canaliser le sang avec ses deux mains pourtant larges et fortes. Ma mère se releva et resta stoïque face à l’urgence des blessures de Chankoowashtay. Comme celui ci l’avait dit, l’armée n’allait pas tarder à arriver. Il lui paraissait donc sage de ne pas créer de heurts et d’attendre que les soldats viennent arrêter les trois hommes. 

« Vous avez combattu à Little Bighorn ? » demanda sèchement ma mère. 
« Vous ignorez tout de ce qu’il s’est passé à Little Bighorn… » répondit Chankoowashtay tout en gémissant de douleurs.      

L’un des Sioux qui avait empoigné ma mère, prit à son tour la parole pour tenter de ménager les forces de son camarade blessé. 
« Nous avons livré plusieurs batailles ses derniers jours. Nous nous sommes battus à Rosebud Creek avec notre chef Tashunca Uitco (Crazy Horse), nous avons remporté la victoire. Nous avons mis en déroute le général Crook et ses hommes. Après cette bataille, nous avons laissé nos familles et nos proches et nous nous sommes rendu à Little Bighorn, où le reste de nos frères Cheyennes nous attendaient. Le général Long Cheveux (Custer) nous a attaqué par surprise. Il pensait que nous ignorerions son arrivée mais les braves de Sitting Bull avaient joué les éclaireurs. Ils nous ont attaqué de toutes parts, pensant que la victoire leur était acquise. Chankoowashtay a tué Long Cheveux de ses propres mains… » 

Je n’arrivais pas à voir cette violence de guerrier chez Chankoowashtay. Il semblait avoir tellement de hauteur et de discernement.  Ma mère se rappela de la description de la dépouille de Custer que lui avait faite le Sergent Thomas. J’ignorais si elle attribuait toutes les blessures faites au Général à Chankoowashtay mais je voyais qu’elle le regardait avec un air accusateur. Le Sioux qui se tenait à côté d’elle, acheva son récit :

« Après la bataille, nous nous sommes dispersés. Nous avons gagné mais nous airons dans les rocheuses comme des traitres. L’armée nous traquent depuis plusieurs jours. Certains de nos frères qui ont combattus à nos cotés ont été tués dans les Black Hills ou envoyés à Pine Ridge. Nous sommes sans nouvelles de nos amis, de nos familles, nos femmes, nos enfants… Nous avons gagné cette bataille mais nous ignorons comment reprendre une vie normale. Nous ignorons si nos proches sont sains et sauf ».  

Au même moment, nous entendîmes les chevaux du Sergent Thomas et ses hommes qui se dirigeaient vers Flanagan. Les deux guerriers Sioux commencèrent à s’agiter. Ils ramassèrent leurs affaires mais on pouvait aisément lire dans leurs yeux qu’ils étaient à court d’idées pour sauver leur peau. Chankoowashtay, toujours allongé dans le foin, était tombé dans l’inconscience tant ses blessures étaient graves.

« On doit les aider Maman ! » suppliai-je à ma mère. 
Elle aussi semblait à court de solutions. Elle savait pertinemment que prêter main forte à un Indien était une trahison faites aux Etats-Unis et qu’elle risquait la prison ou pire encore. Dans le fond, elle ne connaissait pas ses guerriers et ignorait leur histoire. 

Les sabots des chevaux semblaient se hâter de plus en plus. Le Sergent Thomas avait certainement remarqué une agitation inhabituelles à Flanagan… Peut être avait-il entendu les hurlements de ma mère un peu plus tôt. 
« Je t’en supplie Maman ! on ne peut pas les abandonner… Chankoowashtay est mon ami ! Tu as déjà soigné des soldats autrefois, tu pourrais l’aider à s’en sortir…» 
Finalement mon insistance fut payante. Ma mère saisit l’un des guerriers par le bras et le mena vers une porte de la grange plus en retrait. Une porte qui menait directement au poulailler et au jardin. 
« Vous devez partir ! S’il vous voit ici, ils vous tueront soyez en sûr ! » 
« Nous ne partirons pas sans Chankoowashtay ! » lança le deuxième brave. 
Ma mère tenta de rassurer les deux guerriers. 
« Il est préférable qu’il reste ici, je pourrai soigner ses blessures. Je vous fais la promesse qu’il va s’en sortir ! »

Sur ces derniers mots réconfortants, les deux guerriers qui avaient pourtant été si hostile avec ma mère, serrèrent, tous deux, ses mains amicalement et prirent la fuite dans la nuit. 
Il ne fallut pas longtemps pour entendre raisonner dans les plaines deux coups de feu net et clair. Deux coup de feu qui semblaient avoir été fatal aux guerriers Sioux.

Tandis que le Sergent Thomas et ses hommes s’approchaient toujours un peu plus de Flanagan, ma mère demanda mon aide pour cacher Chankoowashtay au plus vite. Nous installâmes son corps en vitesse au milieu de nos vaches. Ma mère le recouvrit avec le plus de foin qu’elle pouvait. Elle s’empressa également de camoufler les écoulements de sang au sol à l’aide d’une fourche.

Nous eûmes à peine de temps de quitter l’étable que le Sergent arriva dans la cour et vint à notre rencontre. 
« Madame O’Sullivan vous allez bien ? » demanda t-il à ma mère sur un ton sincère. 
Ma mère se mit à pleurer sans retenue. Je me souviens avoir été assez surpris. J’ignorais si elle jouait la comédie ou si elle laissait simplement sortir les angoisses qu’elle avait contenu durant plusieurs heures. 
« J’ai eu si peur ! Nous avons entendu du bruit mon fils et moi ! » 
« Nous avons repéré trois Indiens qui rodaient autour de chez vous. Deux d’entre eux viennent d’être abattus mais le dernier est toujours en liberté ». répliqua le Sergent Thomas tout en scrutant avec attention les alentours de Flanagan. 
« Il se peut qu’il soit encore sur votre domaine » 

Sur ces mots, il commença à emprunter le chemin qui menait vers la grange et le jardin. Ma mère sécha ses larmes et changea radicalement d’émotion. On pouvait désormais aisément voir qu’elle était anxieuse. 
Le Sergent ouvrit lui même la porte de l’étable. Ma mère tenta tant bien que mal de le dissuader de rentrer. 
« Je n’aime pas que mes bêtes soient dérangés la nuit. Surtout les vaches, elles produisent moins de lait après, au petit matin ». 
« Vraiment ? J’ai pourtant aperçu une lumière dans l’étable durant plusieurs minutes et je vous ai vu en sortir il y a peu de temps… » répondit le Sergent Thomas. Cette fois, son regard devint beaucoup moins prévenant et amical. Il semblait comprendre que ma mère lui cacher quelque chose. 

Il arpenta la grange, fouinant un peu partout. Ma mère aperçu dans un recoin, sur le sol près des meules, une large tache de sang  qu’elle n’avait pas recouverte de foin. Elle s’avança dans cette direction avec calme et se positionna sur la flaque de sang qu’elle recouvrit grâce à sa longue robe qui trainait légèrement à terre. De temps à autre, elle jetait un regard inquiet vers nos trois vaches qui derrière leur enclos, dissimulaient malgré elles le corps de Chankoowashtay. 

Finalement, le Sergent Thomas ne trouva rien. Il fit signe à ses hommes de le suivre et ils quittèrent la grange. Le Sergent Thomas remonta sur son cheval et avisa de nouveau ma mère de quelques conseils. 

« Les attaques d’Indiens vont être assez fréquente dans les jours à venir, vous seriez plus en sécurité en ville madame »
« Ne vous inquiétez pas pour nous Sergent ! Mon fils et moi préférons rester à Flanagan quoi qu’il se passe… » 

Ces mots de ma mère dessinèrent un large sourire sur mon visage. Ils venaient de confirmer que nous ne partirions finalement pas chez tante Kathleen à Sioux Falls. 
Tandis qu’il allait partir, le Sergent Thomas vit dans mes mains, le loup en bois de Chankoowashtay. 
« C’est un joli bibelot que tu as là petit ! » 
« C’est un Indien qui me l’a donné » 
Le Sergent jeta un regard légèrement accusateur en direction de ma mère. Elle garda la tête froide et esquissa un sourire… Un sourire qui confirmait que notre famille avait un secret. 

Une fois les soldats partis. Ma mère et moi nous précipitâmes à l’étable pour nous assurer que Chankoowashtay était toujours en vie. Ma mère ôta tous le foin qui le recouvrait. Elle apposa son oreille près de son nez et sa bouche pour percevoir sa respiration. Elle se mit à sourire de soulagement. 

« Il respire ! Dany, va vite faire bouillir de l’eau à la maison et rapporte là. Je dois nettoyer sa blessure pour ne pas qu’elle s’infecte ! » 

Fin du chapitre 4 

1 commentaire:

  1. Ce chapitre était vraiment palpitant !!!!! J'espère que Chankoowashtay est en sécurité à Flanagan. Vite vite la suite s'il vous plait

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