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lundi 5 novembre 2018

Chronique 2018 : La caresse de la Sorginak

Avant propos de la chronique : 
L'été touche à sa fin. Voilà un mois que je suis dans mes vallées et pourtant cette question reviens sans cesse : Suis-je bien à ma place sur cette terre de légendes ? Après une longues journée en forêt sur le chemin des Sorcières, je décide de faire une halte au bord d'un ruisseau. Je monte ma tente et sème des bougies le long de mon chemin. 
L'heure est la méditation pendant que la nuit tombe peu à peu. J'écoute cette nature. Je veux la comprendre. La nuit va être belle, pleine de surprises... J'attends mes réponses... J'attends l'âme des sorcières... 


Je suis toujours dans la forêt. Toujours là quelque part entre Sare et Zugarramurdi. Toujours au bord de l’eau, près de la cascade, sous les branches câlines. 

J’ignore l’heure qu’il est. La forêt qui m’entoure s’est effacée. Elle a laissé place à l’obscurité et au mystère. J’y entends les grands-ducs qui chassent, les renards qui traversent les bruyères et les grillons qui s’égosillent près du ruisseau. Je me laisse bercer par la lumière des bougies qui éclairent mon chemin… J’espère une réponse… 

J’ignore l’heure qu’il est. Je suis vraisemblablement endormi. Les bougies ont perdu de leur splendeur. Les voilà timide et vacillante. Au bord de la cascade, j’entends un chant. Beaucoup auraient pris peur. Mais à dire vrai, cette voix douce me rassure et m’apaise. Sans sortir de ma tente, je tends l’oreille et j’écoute. 

Cette douce mélodie, fragile et intemporelle semble être une partie de ma réponse. Je me saisis d’une des bougies et m’avance au bord de l’eau, mon coeur battant et mes mains tremblantes. Malgré la pénombre, elle m’apparait à la lueur de ma bougie, la Sorginak, la jeteuse de sorts. 
Je ne pourrais lui donner d’âge. Elle est à la fois, la soeur, la mère et la fille. Elle est toutes ces femmes qui peuplaient nos vallées et transmettaient leur savoir. 
Elle est Mari, la déesse terre et Amalur, la déesse mère tout à la fois. 

Elle porte en elle une si grande énergie, qu’il m’est impossible de retenir mes larmes dans ma fatigue. Elle est venue à moi par le chant le plus modeste et se tient désormais dans ce bois en Majesté. L’eau semble changer de route à ses pieds. Sur sa longue robe émeraude s’entremêlent les symboles de nos stèles anciennes. Elle s’étend jusque dans l’obscure forêt, devenant à la fois, lichens, herbes, ronces et troncs imposant.

J’ignore quel nom lui donner. C’est peut être pour cela qu’elle est si importante. Je sens sa main se poser sur ma joue égarée. Une main froide comme le secret des pierres et humide comme un matin de rosée. J’entends son long murmure à travers les cimes… « Ne fuis pas le loup si c’est pour te retrouver face à l’ours… » sans qu’à aucun moment elle ne fasse bouger ses lèvres. 

J’ignore l’heure qu’il est… Je viens de me réveiller en sursaut dans ma tente. Les bougies sont mortes et l’aube commence à poindre à travers les branchages. Je n’explique pas vraiment ce qu’il vient de se produire. Je me sens serein, à ma place… La forêt des sorcières vient de m’offrir sa réponse. 


En quittant le bois, mon paquetage sur le dos, je redécouvre ce chemin de pierre où mon coeur s’anime. Les chouettes chevêches y chantent encore et me montrent la voie vers le village. Le brouillard lave les pieds de la montagne et offre à ma vallée un parfum d’irréel. Je pensais rejoindre le village sereinement mais il m’est réapparu… Après tout ce temps… Le loup. Ce loup qui brûle en moi et m’annonce avec gravité que je ne suis plus sur la bonne route… 

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